Bonjour Mauser, bonjour Thermic,
Concernant une possible attaque militaire états-unienne contre l'Iran, je crois que nous avons ici déjà fait le tour du sujet :
Washington n'a que les moyens de lancer une attaque de missiles Tomahawk.
Au vu de l'inefficacité abyssale des services de renseignement états-uniens, une telle attaque aura principalement un effet médiatique,
secondairement seulement un impact retardateur sur l'industrie nucléaire iranienne, et troisièmement un nouveau pas en avant
dans la direction d'une Amérique percue par les musulmans comme un agresseur irraisonné et compulsif.
Ahmadinedjad est certes un personnage atypique. Mais prendre pour argent comptant les dérapages rhétoriques de "l'élu du peuple"
est au mieux une propagande facile à la rentabilité médiocre, au pire une gigantesque erreur d'appréciation.
Le nouveau président iranien est surveillé de près par les Gardiens de la Révolution, qui détiennent toujours la réalité du pouvoir à Téhéran.
Dans le jeu Washington-Téhéran, je ne vois qu'une surenchère verbale qui joue pour l'Iran et contre les USA.
L'agitation presque parkinsonienne d'Ahmadinejad alimente l'hystérie de Bush, Rice & Co, qui voient dans ce concours d'amabilités
une occasion à saisir pour redorer leur blason de faiseurs de pluie et de beau temps au Moyen-Orient,
blason réduit en confettis par la guerre d'Irak. En retour, ces menaces Néo-Cons justifient les bravades du nouveau président iranien,
qui voit déjà l'Iran devenir LA grande puissance du Moyen-Orient, après bien sur avoir défié en bonne et due forme les Etats-Unis
comme il le fait en ce moment. Chacun des protagonistes semble donc se frotter les mains à chaque surenchère de l'autre.
Etonnamment, les Néo-Cons ne comprennent pas que dans leur actuel bras de fer avec l'Iran, ils jouent perdants, comme ils nous ont accoutumés à le faire.
Ils savent bien que si l'Iran veut se doter de l'arme nucléaire, personne n'y peut rien - à moins d'envahir l'Iran, ce que personne n'a les moyens de faire.
Tout au plus les Néo-Cons peuvent-ils retarder le processus par des attaques de missiles, en s'enfonçant dans leur image semi-involontaire
de puissance viscéralement anti-musulmane.
Quant aux Iraniens, ils jouent "gagnant-gagnant", comme dit Mauser. La guerre d'Irak a fait se volatiliser l'équilibre Iran-Irak qui était le garant
de la stabilité du Moyen Orient depuis les années 20. Au jeu des Néo-Cons, Téhéran a donc touché le jackpot.
La guerre d'Irak a ouvert la "boite de Pandore", comme le dit Jacques Chirac, d'une guerre civile entre chiites et sunnites dont seul Téhéran va tirer parti.
L'Iran n'a jamais été aussi puissant dans le secteur depuis la chute de Persépolis aux mains d'Alexandre le Grand en 330 avant Jésus-Christ,
ce qui est tout de meme un superlatif quasi-hollywoodien à porter à l'actif de l'administration Bush.
Si Bush et Rice inondent la planète d'invectives contre l'Iran, ils ne feront que confirmer l'image qu'ils ont eux-memes servie sur un plateau à un pays qui,
ne l'oublions pas, se considère toujours en l'an 2000 comme l'héritier de l'ancienne Perse - au "détail" près de la religion, évidemment.
A mes yeux, la véritable question qui se pose au Moyen Orient en 2006 n'est donc pas
ce que vont y faire les Américains - car quoi qu'ils y fassent, ils est trop tard, mais bien justement ce que vont y faire les Iraniens.
Fritz.
Au passage, merci Thermic pour l'IRIB, dont j'ignorais l'existence. Cela fait penser qu'il serait peut-etre une bonne idée de créer sur Phoenix
une base de données de sources, avec les sites web des agences, des organes de presses, des chaines de télévision
et d'autre sources intéressantes.
P.S. : ma touche "accent circonflexe" est H.S., comme vous l'aurez certainement constaté.
Quant au "messianisme de Bush", pointé par Thermic, ce profil psychologique n'est pas l'apanage des Néo-Cons.
Il remonte au XVIIIe siècle, et il mérite un fil spécifique dans le forum Histoire.
Un magazine de qualité avait d'ailleurs publié il y a quelques années un solide dossier sur le sujet.